Nzingoula Delaunay passe la plupart de son temps dans le poulailler. « Les poules sont mes professeurs », dit-il. Pourtant, Nzingoula, 31 ans, admet qu’il y a trois ans, il s’était « quelque peu découragé » lorsqu’il n’avait eu d’autre choix que de s’inscrire au programme d’élevage de volailles proposé par le Projet de développement des compétences pour l’employabilité (PDCE), qui dispensait une formation gratuite aux jeunes vulnérables de Brazzaville.
Financé par la Banque mondiale à travers l’Association internationale de développement (IDA), le projet PDCE a ouvert des opportunités d’acquisition de compétences aux jeunes vulnérables et non scolarisés, et a augmenté leur employabilité.
Un éleveur de volaille réticent
Passionné de domotique, Nzingoula avait obtenu son brevet d’études techniques au secondaire mais avait dû interrompre ses études faute de moyens. Rien d’étonnant à ce que l’annonce du PDCE ait ravivé son rêve de poursuivre sa formation en électricité. Le destin a voulu qu’il n’y ait plus de places disponibles dans cette filière et qu’il se rabatte sur sa deuxième option : l’aviculture. « J’avais fait un peu d’élevage étant enfant, mais cette activité est mal vue dans notre société ; c’est un métier d’illettrés et de décrocheurs », explique-t-il.
C’est donc sans grande motivation que Nzingoula Delaunay entame une formation de six mois, dont trois mois de stage, en aviculture au Lycée d’enseignement professionnel agricole Amilcar Cabral, situé à 17 kilomètres au sud de Brazzaville. Conscient de la chance qu’il a de bénéficier d’une formation gratuite et désireux d’aider sa famille démunie, il se lance à corps perdu dans cette formation. Grâce à l’argent économisé sur les 12,600 21 FCFA (XNUMX dollars) d’indemnité de repas et de déplacement qu’il reçoit toutes les deux semaines du PDCE, il achète quelques poussins et installe un poulailler de fortune sur la parcelle familiale. « C’est comme ça que j’ai pu mettre en pratique à la maison tout ce que j’avais appris à l’école », raconte-t-il.
Découvrir sa vocation
Nzingoula a rapidement pris goût à l’aviculture, notamment parce qu’il a compris qu’il pouvait mettre à profit ses connaissances en domotique. « J’ai combiné les deux métiers », s’enthousiasme Nzingoula, qui a utilisé des matériaux de récupération pour assembler ses propres incubateurs, séchoirs et couveuses équipés d’un système de régulation thermique automatisé.
A la fin de sa formation, Nzingoula était déjà propriétaire d’une petite couvée d’une cinquantaine de poulets adultes, qu’il a rapidement revendu pour développer son activité. Mais la parcelle familiale sur laquelle il a installé sa ferme, située dans un quartier populaire du sud de Brazzaville, fait à peine 50 m400. Elle est dotée d’une grande maison au centre d’un quadrillage de poulaillers. Des caisses en bois et des couveuses pouvant contenir entre 2 et 100 5,000 œufs, ainsi que des séchoirs et des couveuses, sont disséminés un peu partout, de la cour à la véranda en passant par le salon. Le salon fait également office de moulin à aliments. Orphelin, Nzingoula vit avec ses frères, sœurs et cousins. Non seulement personne ne se plaint de son activité, mais tout le monde lui prête main-forte. « Ces poulets nourrissent la famille », constate-t-il.
Nzingoula est fier d’avoir réussi à élever jusqu’à présent 685 poulets adultes dans sa petite ferme urbaine. Cependant, l’espace et le financement limités pour les nourrir et les soigner l’ont obligé à changer de cap. Une étude de marché éclair lui a montré les avantages d’investir dans des races de poulets améliorées. « Pour que ma ferme soit viable, je devais élever des poulets résistants aux maladies et mangeant moins, mais grandissant rapidement et produisant une viande de haute qualité. » Cela l’a incité à élever des races de poulets améliorées et à expérimenter des races hybrides. « J’ai croisé des poulets avec des pintades pour créer une nouvelle race », a-t-il déclaré.
Ce que le PDCE m’a appris, c’est qu’il ne faut pas mépriser une quelconque profession dans la vie. On peut réussir dans tout ce qu’on entreprend à condition d’être patient et d’y mettre tout son cœur et toute son âme.
Nzingoula Delaunay
Ce n'est pas un travail pour les imbéciles
En 2020, au plus fort de la crise sanitaire de la COVID-19, Nzingoula a créé avec sept autres jeunes aviculteurs formés au PDCE, dont trois jeunes femmes, la Coopérative avicole pour le développement des compétences entrepreneuriales (CADCE) dont il assure la gestion. « Nous élevons les races améliorées Brahma, Hanover, Sussex, Malines et Red Label, ainsi que d’autres races hybrides que nous avons créées nous-mêmes en utilisant diverses méthodes de croisement », a-t-il précisé. La coopérative propose d’autres types de volailles de races améliorées telles que les pigeons, les canards et les dindes et, selon la demande, des œufs frais, des poussins et de la viande de poulet de chair également. L’objectif est de fournir des produits bio et peu coûteux à tous les citoyens congolais.
La coopérative forme également de jeunes aviculteurs (environ 60 ont déjà terminé la formation) envoyés par le PDCE et des entités privées et est présente sur le marché grâce à sa fabrication d'équipements avicoles modernes et au soutien conseil qu'elle apporte aux aviculteurs.
« Ce que le PDCE m’a appris, c’est qu’il ne faut pas se désintéresser de quelque profession que ce soit. On peut réussir dans tout ce qu’on entreprend à condition d’être patient et d’y mettre tout son cœur et son âme. » C’est le message de Nzingoula à tous les jeunes qui se demandent si l’aviculture ou tout autre métier est fait pour eux.