Environ 80 experts internationaux de l'EFTP se sont réunis à Dakar en juin 2022 à l'invitation de l'IIPE-UNESCO. Il s'agissait non seulement de faire le point sur les actions de la plateforme d'expertise en formation professionnelle (Pefop) au cours des sept dernières années, mais surtout de se projeter vers l'avenir.
Les discussions et réflexions avec les partenaires ont révélé que le triangle « accès, employabilité, qualité » couvrait largement les préoccupations et priorités des différents pays et bailleurs de fonds en matière d'EFTP.
Gros plan sur huit enjeux clés qui en découlent, et tout autant de besoins, auxquels l'IIPE Dakar entend répondre dans les années à venir, à la demande du gouvernement.
Accéder à l'EFTP
Structuration de la formation professionnelle informelle
L’économie informelle est de loin le plus grand pourvoyeur d’emplois en Afrique. Pour beaucoup de ses acteurs, l'enjeu n'est pas tant de « formaliser » la formation professionnelle informelle, mais plutôt de contribuer à la structurer et à la renforcer, dans le but de voir leur formation reconnue par les autorités nationales.
- Dans ce contexte, le soutien au développement de mécanismes de validation des expériences acquises et de reconnaissance des certifications, tel que mené récemment avec la Mauritanie par l'IIPE Dakar, répond à un besoin important dans tous les pays africains.
- Plus largement, l'Institut promeut et soutient la simplification et l'harmonisation des systèmes de certification des compétences au niveau national mais également entre les pays au niveau régional.
Garantir l’accès et l’inclusion à l’EFTP pour les groupes vulnérables
Le constat est unanime : les jeunes hommes urbains ont un accès beaucoup plus facile que les autres à la formation professionnelle « formelle » en Afrique. Permettre aux filles et aux femmes, aux populations rurales et aux personnes déplacées internes d’avoir un accès équitable à l’EFTP est une question clé. Il en va de même pour l’inclusion des personnes handicapées dans la formation professionnelle, qui en est encore à ses débuts. Pour relier les besoins spécifiques de ces groupes vulnérables à ceux du marché du travail, une planification sensible à ces questions est nécessaire.
Employabilité des jeunes
Renforcer le continuum éducation > formation professionnelle > emploi
Dans un contexte de très forte pression démographique, l’accès au marché du travail reste un axe des politiques gouvernementales. Cela passe avant tout par une éducation de base de qualité, base fondamentale pour accéder à la formation professionnelle et, enfin, à l’emploi. « Pour devenir plombier, mécanicien ou même ingénieur de haut niveau, les jeunes doivent d'abord posséder des compétences de base en lecture, écriture, calcul, ainsi que des compétences de vie », souligne Koffi Segniagbeto, chef du bureau IIPE-UNESCO de Dakar. Assurer le continuum entre l'éducation, la formation professionnelle et l'emploi est au cœur du travail de l'IIPE-UNESCO Dakar sur l'EFTP.
- L'Institut contribue à établir et développer des synergies durables entre les différentes autorités ministérielles concernées.
- La production de nouvelles connaissances sur ces questions est déterminante pour l’innovation et l’information des politiques publiques.
- Enfin, l'appui technique au développement de systèmes d'information permettant d'anticiper et d'identifier les besoins des marchés du travail en termes d'emploi et de compétences répond à une demande forte des pays et de leurs partenaires.
Impliquer le secteur privé sur le long terme
Les experts de l’EFTP en Afrique semblent désormais partager la même conviction : mobiliser le secteur privé n’est plus une option pour renforcer les systèmes d’EFTP et développer durablement l’employabilité des jeunes. Les acteurs privés doivent être encouragés à apporter une contribution concrète à la planification stratégique du sous-secteur de l’EFTP et à la mise en œuvre des politiques.
Au niveau local, cela pourrait impliquer que le secteur privé mette à disposition des équipements et des ressources humaines pour favoriser l'insertion professionnelle des jeunes et aligner l'offre de formation sur les réalités du marché.
- Développer, faciliter et fédérer les réseaux d'EFTP publics et privés fait partie de l'expertise développée par l'IIPE-UNESCO Dakar en Afrique au cours des dernières années. Plusieurs mécanismes de dialogue et de concertation sont issus de partenariats en Mauritanie, au Sénégal, au Burkina Faso et le seront prochainement en République Centrafricaine.
- Concernant le financement, l'IIPE peut apporter son soutien à la restructuration des fonds de formation. Dans la plupart des pays africains, ce sont les fonds de formation qui gèrent la taxe d'apprentissage à laquelle contribue le secteur privé.
Renforcer la transition numérique et écologique de l’EFTP
Les enjeux sont vastes et les défis immenses. D’une part, l’EFTP doit accélérer sa transformation numérique pour former efficacement les jeunes aux métiers nécessitant des compétences numériques, ainsi que structurer la digitalisation des outils et des modes de formation, accélérée par la pandémie de COVID-19. D’autre part, face à l’urgence du changement climatique et aux crises continuelles, les préoccupations écologiques doivent désormais systématiquement guider les stratégies et politiques d’EFTP sur le continent. Grâce à son soutien à la planification de l'EFTP, l'IIPE-UNESCO sensibilise les décideurs politiques à ces priorités aux plus hauts niveaux ministériels. L’Institut produit également de nouvelles connaissances sur ces sujets, pour éclairer les politiques et décisions en faveur de la transition numérique et écologique de l’EFTP – et aider les différents acteurs à agir.
Aligner l’offre de formation locale avec les réalités économiques
Les entreprises établies dans les capitales des pays africains ont souvent des besoins en compétences très différents de celles des zones rurales. Si la décentralisation des systèmes d’EFTP sur le continent a commencé, elle est encore loin d’être achevée.
- Développer des partenariats public-privé localement est une étape essentielle pour relier de manière durable les besoins des entreprises à ceux des centres de formation. Tout en intégrant les stratégies locales dans les politiques et orientations inculquées au niveau central.
- Sur un autre plan, l'Institut favorise la mutualisation des ressources et des outils de formation professionnelle entre les pays à travers le développement et l'animation de réseaux multi-pays.
- Enfin, le soutien au déploiement de systèmes d'information efficaces pour identifier et suivre de près les besoins du marché du travail local et national, correspond à une forte demande des parties prenantes.
Qualité
Professionnaliser la formation des formateurs
C’est l’un des principaux facteurs influençant la qualité de la formation technique et professionnelle dispensée aux apprenants. En Afrique, les profils des formateurs varient énormément. La planification est souvent inégale en ce qui concerne les besoins des formateurs, et les institutions spécialisées dans la formation des formateurs sont rares et disposent de ressources limitées ; par ailleurs, 70 pour cent des formateurs de l'EFTP n'ont aucune expérience récente dans des entreprises liées à leur secteur, ce qui montre la faible implication des entreprises dans la formation dispensée.
L'IIPE-UNESCO Dakar met son expertise à la disposition des différents pays pour la planification des besoins de formation des formateurs à travers le développement et l'accompagnement de réseaux de centres de formation engagés dans l'immersion professionnelle des formateurs.
Renforcer les capacités de gestion des acteurs de l’EFTP
La gouvernance et la gestion comptent parmi les principales faiblesses des systèmes d’EFTP en Afrique. Les parties prenantes manquent souvent d’une vision globale et d’outils méthodologiques et techniques pour travailler ensemble et atteindre leurs objectifs communs. Si le renforcement des capacités constitue un thème transversal pour améliorer la qualité de l’EFTP, certains besoins spécifiques ont été soulignés. Parmi ceux-ci, un soutien plus important aux observatoires nationaux de la formation professionnelle,
pour aider l’écosystème dans son ensemble à identifier les besoins du marché du travail.
Le renforcement des capacités des parties prenantes à planifier et gérer l'éducation et la formation est au cœur du mandat de l'IIPE-UNESCO. Des formations de haut niveau (comme la formation sur le management de l’EFTP lancée en 2020) sont développées et déployées dans ce cadre.
